Un blog mis à jour de temps à autre, quand j'ai un peu de temps!

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samedi 29 novembre 2014

Apprivoiser le monde de l'emploi au Chili, ou comment travailler pour une organisation internationale au nom interminable

Salut salut!

Il y a un aspect important de mon passage au Chili que je n'avais pas encore abordé: mon travail à titre de stagiaire auprès d'une organisation internationale basée à Santiago.

Dit comme ça, ça en jette, non?

Mais soyons sérieux et commençons par le commencement. Début automne 2012, avant de partir faire ma session d'études au Chili, je réalise que je devrai faire mon stage pour compléter ma maîtrise tout juste après avoir terminé mes cours et mon essai, soit dans quelques mois. (N.B.: à l'époque, j'étais jeune et fou et je pensais naïvement que j'allais finir mon essai en décembre 2012. C'était le bon temps.). Je venais aussi de recevoir mon horaire pour ma session au Chili, et je m'apercevais que je n'avais que 6h de cours par semaine, ce qui, j'en étais sûr, allait me laisser amplement de temps libre (décidément, j'étais vraiment un indécrottable optimiste). Et tout à coup il me vient une idée de génie: pourquoi ne pas profiter de mon passage au Chili pour faire à la fois ma dernière session d'études ET mon stage de fin de maîtrise? Certains amis à moi avaient effectué des stages à l'ambassade du Canada à Santiago : pourquoi pas moi? J'aurais juste à leur préciser que je suis disponible à temps partiel, et tout pourra s'arranger...

L'idée fait son chemin. Avec l'aide de la conseillère responsable des stages de mon programme, je constate en plus que deux concours sont ouverts pour un stage à l'ambassade de Santiago (non-payés, mais bon, bienvenue dans le merveilleux monde des stages à l'étrangers... et aussi du marché de l'emploi actuel pour les jeunes). Je postule, je suis pris en entrevue... mais finalement je ne suis pas pris, justement parce qu'ils cherchaient quelqu'un à temps plein et que je ne pouvais leur offrir que du temps partiel.

(Note: avec le recul, c'est une excellente chose que je n'aie pas été pris. C'était une TRÈS mauvaise idée de vouloir combiner session d'études et stage en quatre-cinq mois. Côté temps, juste avec l'essai et les travaux que je devais faire pour l'université, ça n'aurait JAMAIS marché. Mais ça, insouciant tata que j'étais, je ne le savais pas à ce moment-là.)

Bref, l'ambassade me dit tout de même de rester en contact avec eux, en me disant que c'est possible qu'ils aient aussi des stages à temps partiel quand je serai au Chili. Ils m'invitent à leur écrire à nouveau juste avant mon départ pour le Chili. Ce que je fais.

"On n'a pas de stage pour toi", qu'ils me répondent par courriel, "mais par contre, que dirais-tu de faire un stage avec le Congrès national chilien? Ils cherchent des étudiants canadiens (gratis, naturellement) pour travailler à temps partiel sur le thème de la transparence gouvernementale. Ça t'intéresse? Si oui, on te mettra en contact avec le Chilien qui s'occupe de tout ça."

Travailler pour l'équivalent de l'Assemblée nationale au Chili? Mets-en que ça m'intéresse!!! Cela dit, il faut voir si les tâches sont en soi d'intérêt pour moi et si je peux vraiment travailler à temps partiel. Je dis à l'ambassade de me mettre en contact avec le Chilien en question pour avoir plus de détails et j'envoie mon CV. Ledit Chilien me récrit rapidement pour me dire qu'il veut me rencontrer dès mon arrivée à Santiago, question que je commence à l'aider à travailler sur ses dossiers. Pas d'entrevue, rien: j'avais déjà le stage! Sans information, par contre, mais bon...

Et c'est comme ça que j'ai commencé à travailler pour Me Juan Pablo Olmedo, un avocat chilien qui, en sus de ses fonctions premières, agissait comme mandataire du Congrès national chilien sur la question de la transparence parlementaire.

Santiago, deux semaines après mon arrivée. Après quelques échanges de courriel, Juan Pablo m'invite à le rencontrer pour qu'il puisse m'expliquer ce que je devrai faire dans les prochains mois. C'était nécessaire parce que, jusqu'ici, très peu de détails sur mes nouvelles fonctions m'avaient été communiqués et, soyons francs, tout cela restait très nébuleux pour moi. Juan Pablo me convoque à 14h à son bureau, situé dans un édifice commercial du chic quartier de Las Condes. Je me présente à son étincelant bureau d'avocats et le réceptionniste m'invite à patienter sur l'une des chaises en attendant l'arrivée du maître des lieux. Évidemment, puisque je suis arrivé avec 5 minutes d'avance. Réflexe de novice de la part d'un Nord-Américain qui accorde de l'importance à la ponctualité, dans un pays (et un continent) où tout le monde est toujours en retard!

Pendant que j'attends, je me passe la remarque que, s'il y a bien quelque chose qui n'est pas dépaysant partout dans le monde, c'est bien les bureaux d'affaires des entreprises de services professionnels. J'aurais pu être à Montréal, à Singapour ou à Berlin, ce bureau aurait très bien pu s'y retrouver, avec ses beaux tapis, ses grandes salles de réunions modernes, ses portes en bois ouvragées et ce réceptionniste tiré à quatre épingles calé derrière son ordinateur posé sur une haute table en verre poli (avec le logo du cabinet)...  Enfin, après 15-20 minutes d'attente, un grand homme en chemise à l'air soucieux, la quarantaine, sort en coup de vent de son bureau. Juan Pablo se dirige vers moi, me salue, puis me dit: "As-tu dîné? Oui? Ah, pas moi. Viens, on va prendre un café.".

D'accord. J'avais oublié qu'ici, on dîne tard! Je m'attendais à une réunion de travail, pas à un dîner/café d'affaires! On se retrouve donc sur la terrasse d'un petit café situé en face du bureau. Juan Pablo commande de manière expéditive un sandwich, me paie un café, sort une cigarette et se met à fumer tout en pianotant sur son téléphone. Entre deux bouffées et bouchées, il me commence à m'expliquer ce qu'il attend de moi. Son débit est rapide, son accent chilien est solide et il parle sans cesse: bref, il n'est pas facile à comprendre. Pas de doute, Juan Pablo Olmedo est un homme pressé, très occupé et qui, définitivement, est un grand extraverti de nature. Un gars qui ne s'en laisse pas facilement imposer (mais qui par contre en impose aux autres), sûr de lui, qui sait où il s'en va: la caricature d'un certain type d'avocat!

Juan Pablo m'apprend qu'il est le secrétaire général et unique employé du (prenez votre souffle) Réseau parlementaire interaméricain pour la transparence, l'accès à l'information publique et la probité (Red Parlamentaria Interamericana de Transparencia, Acceso a Información Pública y Probidad). Cette nouvelle organisation, fondée en 2012 à l'initiative du Congrès national chilien, se veut un forum latino-américain visant à rendre les parlements plus ouverts (dans le sens de rendre davantage d'information accessible au grand public) et à lutter contre la corruption. Des députés de  différents gouvernements d'Amérique latine en font partie, de même que des ONG locales et internationales. Juan Pablo veut que je l'aide dans différentes tâches liées, notamment, à l'organisation de la prochaine réunion du Réseau en Colombie, au contenu du site web (censé être mis sur pied bientôt) et à diverses autres tâches ponctuelles de soutien. 

Tout cela est bien beau, mais concrètement, que suis-je censé faire? Réponses vagues. Pour tout vous dire, le Réseau était naissant, et Juan Pablo lui-même ne semblait pas tout à fait certain du travail à faire. En fait il avait beaucoup de projets pour le Réseau, mais ceux-ci étaient difficiles à transposer en initiatives pratiques. L'impression qui se dégageait de mon premier entretien avec lui était donc qu'il ne savait pas trop quoi me faire faire précisément maintenant, mais que pas de stress, ça viendrait et les choses se placeraient. Et en effet: au cours de ma session au Chili, il pouvait parfois se passer une semaine ou deux sans que Juan Pablo ne me confie de mandats précis, puis tout à coup quelque chose d'urgent surgissait, du genre la production d'un document que je devais lui remettre "a la brevedad" i.e. dans les plus brefs délais! Bienvenue dans le monde du travail, saveur Amérique latine!

À la fin de notre entretien, Juan Pablo m'a laissé en regagnant en vitesse son bureau. Nous avons convenu de nous rencontrer hebdomadairement pour faire le suivi des dossiers, ce qui a eu lieu à maintes reprises par la suite, la plupart du temps à son bureau, ou encore dans un café des environs. Toujours en vitesse, je n'ai jamais rencontré Juan Pablo sans qu'il ne semble hyper pressé! J'ai aussi pu connaitre au fil des rencontres sa gentille adjointe Carolina Matta. 

Au final, le stage a été assez intéressant. Voici certaines des tâches que j'ai eues à faire :

- Rédaction d'un bref document de présentation du Réseau, destiné au site Internet à venir (finalement le site Internet n'a pas été mis sur pied quand j'étais au Chili, et je ne suis pas certain que ce travail ait servi, mais bon)
- Traduction de l'espagnol à l'anglais d'un long discours du Sénateur Hernan Larrain, élu chilien en charge du Réseau. Le sénateur Larrain allait aux États-Unis pour présenter à un think tank américain les initiatives du Chili en matière de transparence parlementaire, dont les activités du Réseau, et Juan Pablo m'a mis en charge de faire la traduction du discours. Bien qu'il s'agisse d'une tâche plus cléricale, c'était quand même un beau défi de traduire quelque chose de ma 3e langue à ma 2e! J'étais assez content du résultat, et il faut croire que le sénateur aussi puisqu'il a prononcé le tout dans son entièreté lors de son passage aux États-Unis!
- Tentatives d'établir des collaborations entre le Réseau et des institutions canadiennes: ça, c'était le dada de Juan Pablo, et c'est d'ailleurs pourquoi il était en contact avec l'ambassade du Canada (et que j'étais là au Chili à tenter de l'aider). L'affaire, c'est qu'il ne savait pas trop ce qu'il voulait ni à quelle porte cogner, et moi non plus à plus forte raison. En plus, disons qu'à titre d'étudiant je ne disposais pas d'un réseau particulièrement impressionnant dans le domaine de la transparence parlementaire! Les réflexions de Juan Pablo m'ont amené à me concerter avec l'ambassade du Canada au Chili, dont j'ai rencontré certains employés (je vous en reparlerai) de même qu'avec le Centre d'études interaméricaines de l'Université Laval où je travaillais en temps qu'assistant de recherche. Finalement, Juan Pablo a fini par arrêter son choix sur ParlAmericas, une institution intergouvernementale mise sur pied par le Canada pour faire le lien entre les différents parlementaires des Amériques. À la demande de Juan Pablo, j'ai organisé une rencontre par Skype entre ce dernier et la directrice de ParlAmericas, et je me suis occupé des suivis par la suite (le tout nécessitant une autre rencontre Skype réunissant la directrice et moi). Je ne sais pas si des liens durables ont finalement été forgés entre le Réseau et ParlAmericas, mais j'ai du moins contribué à les faire naître!
- Visite du parlement et du Sénat à Valparaiso: je ne vous en dis pas plus, je vous en reparlerai!
- Et d'autres petits trucs ad hoc.   

En somme, ce stage m'a ouvert les yeux sur le monde du travail au Chili, tout en m'offrant l'extraordinaire possibilité de travailler, ne serait-ce que brièvement, dans le domaine des relations internationales à l'étranger. J'ai pu y côtoyer des diplomates, des parlementaires et des représentants d'ONG internationales, et voir quel genre de travail ils pouvaient effectuer au quotidien. Si les tâches que j'avais à faire n'étaient pas toujours si excitantes et que j'avais fréquemment l'impression de ne pas trop savoir où on s'en allait avec tout ça, ça a quand même (et peut-être justement pour ça) été une expérience très enrichissante du point de vue personnel et professionnel! Je n'avais pas de compétences particulières dans le domaine de la transparence parlementaire, mais ça m'a permis de m'y initier. Le tout à coût nul, puisque bien que je n'étais pas payé, j'étais déjà à Santiago pour mes études. Bref, un ajout intéressant à mon bagage d'expérience en relations internationales!
 À bientôt!

samedi 15 novembre 2014

Santiago, version touriste

Salut!

Jusqu'ici, je vous ai beaucoup parlé de la recherche d'apparts, de la bureaucratie, de l'université et de toutes sortes d'autres choses. Mais ma session à Santiago ne se résume pas qu'à ça! Bien que mes études me prenaient beaucoup de temps, en quatre mois, j'ai quand même eu le temps de visiter un peu la ville!

Voici donc deux activités "touristiques" parmi d'autres que j'ai eu l'occasion de faire à Santiago durant ma session d'études! N.B.: je ne vous conterai pas tout ce que j'ai visité à Santiago, ce serait très long, et on en a déjà beaucoup parlé dans notre blogue sur notre voyage en Amérique du Sud!

Bicipaseo "Santiago en ruinas"

Mon ami Tirso, chez qui je demeurais avant de trouver mon appart, est, entre autres choses, un fan de vélo. Peu de temps après mon arrivée au Chili, il me mentionne, au détour d'une conversation, l'existence du Bicipaseo.

"Le Bici quoi?"
"C'est un genre de tour de ville de Santiago en vélo. Un dimanche par mois, le collectif citoyen qui s'occupe de ça fait un itinéraire en fonction d'un thème, et fixe un point et une heure de ralliement. Ensuite, tout le monde converge à l'heure et l'endroit prévu, et c'est parti ensuite pour un beau tour de ville! La police bloque les rues pour que les cyclistes puissent y circuler en toute sécurité. Et le plus beau dans tout ça, c'est que c'est gratuit (ce qui n'est pas rien, au Chili)! Je ne pourrai pas y aller ce dimanche, je te passe mon vélo si tu veux!"

Et c'est comme ça que j'ai rejoint une marée de vélos vers 10h du matin au coin de la rue où habite Tirso! Le thème du tour de vélo : "Santiago en ruinas" (Santiago en ruines). Ça promettait! Notre premier arrêt fut la cathédrale en ruines située juste en face de mon appart (je ne le savais pas encore à ce moment-là). Ce qui était bien, c'est qu'il y avait en plus un guide qui prenait le temps d'expliquer l'histoire du bâtiment en question à chaque arrêt, avec plein de détails!

Santiago étant une ville très plate (dans le sens de "non-accidentée" là!), c'est parfait pour les vélos! Après avoir roulé un moment dans Barrio Brasil (mon quartier), on a ensuite traversé la Alameda vers  le quartier Republica avant de s'arrêter bien plus loin devant un haut mur cachant un terrain en friche. Selon ce que nous a expliqué le guide, il y aurait eu ici une grande gare, du temps où le cuivre et le nitrate convergeaient tous en train vers la capitale puis vers Valparaiso avant d'être exportés vers l'Europe et les États-Unis. Puis, on s'est enfoncés dans des quartiers de plus en périphériques, où je ne serais jamais allé seul parce que 1) il n'y a strictement rien à y faire et 2) les quartiers périphériques sont, rappelons-le, moyennement safe. Les bâtiments de quelques étages furent bientôt remplacés par des maisonnettes typiquement chiliennes, des genre de petits bungalows à un étage, sis au milieu d'un petit terrain entouré de grilles. Le soleil de midi commençait à taper très fort lorsque nous nous sommes arrêtés devant un immense complexe abandonné en béton, sans murs et plutôt glauque. Cette construction éléphantesque, nous a expliqué le guide, aurait dû devenir un hôpital. Pour diverses raisons obscures, la construction fut stoppée alors que toute la structure en béton (escaliers, poutres de soutien, étages...) avait été construite, laissant une incongruité sans nom au beau milieu d'un terrain vague sans arbres, en banlieue de la ville! Mince consolation face à ce spectacle peu glorieux: saisissant le potentiel publicitaire de l'endroit, de courageux étudiants avaient trouvé le moyen de se rendre au sommet de l'immeuble et d'y graffiter en grosses lettres rouges "L'éducation gratuite, maintenant!", question de rendre le tout visible à des lieux à la ronde!

Une fois repartis, on a pu s'arrêter, dans un autre quartier, dans un petit parc sis devant une ancienne usine. Cette halte a ravi certains de nos accompagnateurs impromptus: les chiens! Vous vous souvenez que Santiago possède un nombre ahurissant de chiens errants! Et quoi de plus excitant pour un chien que de suivre ou de précéder une meute de cyclistes, en jappant à qui mieux mieux? Bref, on a été escortés par tout plein d'amis à quatre pattes tout au long du parcours, dont un chien super cute qui ne nous pas lâché du début à la fin!

Finalement, le tour s'est terminé dans un grand parc un peu au sud de la ville, près d'un lac où des Chiliens profitaient du beau temps pour faire des barbecues en plein air. J'ai alors quitté le groupe pour revenir chez Tirso, me frayant un chemin le long des pistes cyclables de Santiago. "Piste cyclable" est par ailleurs un terme un peu grandiloquent pour désigner les voies prévues pour les vélos dans la ville. Selon Tirso, il y a quelques années, la ville a décidé de se doter d'un réseau cyclable, mais sans vouloir y investir des sommes importantes. Le résultat est pour le moins bancal: plus souvent qu'autrement, les pistes cyclables sont de simples délimitations de peinture à même le trottoir, d'environ 30 cm de large! Ça monte et ça descend du trottoir dans la rue, au gré des obstacles, ça tourne raide face à un arbre... Bref, c'est tout sauf une vraie piste cyclable! L'initiative est louable, mais c'est un bel exemple de "botchage" en règle d'un projet!

Tout ça pour vous dire que ce fut une très belle journée! N'hésitez pas à vous joindre à un Bicipaseo si vous êtes de passage à Santiago, c'est un excellent moyen de découvrir la ville gratuitement! Et leurs thèmes sont parfois vraiment originaux: ils ont notamment organisé un tour de vélo sur le lit de la rivière Mapocho, littéralement!

Cerro San Cristobal

Tout comme Montréal a le mont Royal, Santiago a aussi sa montagne en pleine ville qui fait office de grand parc urbain: le cerro San Cristobal. Visible de tous les quartiers, il surplombe le centre-ville et les quartiers riches (notamment Las Condes).

En trois mois de séjour à Santiago, je n'y avais pas encore mis les pieds, et avec le travail qui s'amoncelait en fin de session je commençais à me demander si j'allais un jour pouvoir y aller. Puis, un samedi matin de la fin du mois de mai, je me suis réveillé pour découvrir un spectacle magnifique par la fenêtre : la cordillère des Andes toute couverte de neige! Il avait dû pleuvoir durant la nuit, ce qui avait chassé le smog qui s'accumule au-dessus de Santiago l'hiver. Les Andes, habituellement d'un brun terne lorsqu'elles ne sont pas cachées par la pollution, brillait d'un éclat blanc majestueux dans un ciel bleu pur dépourvu de tout nuage. C'était décidément un coup d'oeil superbe!

J'aurais dû étudier cette journée-là, mais l'occasion était définitivement trop belle pour que je passe ma journée enfermé à l'intérieur. Et quel meilleur endroit pour admirer les montagnes que du sommet du Cerro San Cristobal?

Je me suis donc rendu à pied, à travers une marche qui m'a fait traverser le centre-ville et le quartier branché des bars situé juste sous la montagne. Une fois sur place, mon plan initial était d'atteindre le sommet du Cerro par le téléphérique qui donne une très belle vue sur la ville. Sauf que... je n'étais naturellement pas le seul à avoir comme projet de me balader au Cerro! Comme une très longue file d'attente s'étirait devant le téléphérique, je me suis donc décidé à monter à pied. À l'entrée du site, une grande carte indiquait vaguement plusieurs sentiers pour se rendre au sommet. Mon choix s'est arrêté sur l'un de ceux qui partaient un peu plus loin. Mal m'en prit: simplement trouver le début du sentier fut long et complexe, puis, une fois sur le bon chemin, je me suis vite rendu compte qu'il y avait de plus en plus de pistes qui partaient dans tous les sens! En plus j'étais pratiquement seul, ce qui était un peu moyen côté sécurité... Par contre, j'avais une vue imprenable sur les Andes, me trouvant du côté de la montagne qui y fait face!

Au final, je me suis bien rendu au sommet sans encombres, seulement pour découvrir une grande plateforme panoramique noire de monde! Après avoir admiré un moment les vues époustouflantes sur Santiago et les Andes enneigées, je suis monté au sommet complètement, là où trône une croix et des estrades d'où Jean-Paul II a un jour célébré la messe. En chemin, je me suis arrêté un moment pour visiter la jolie chapelle de l'endroit.

Le parc étant immense, impossible de tout visiter en un après-midi! J'ai donc choisi d'explorer une autre partie, où je me suis bien amusé à prendre des photos où contrastaient les palmiers sur fond d'Andes saupoudrées de neige! Puis, je suis revenu en bas de la montagne (cette fois par le sentier officiel, que j'aurais dû prendre dès le départ!), tout heureux d'avoir pu échapper aux études pour un bref instant! En revenant à l'appart, j'en ai profité pour longer le Rio Mapocho le long d'une longue allée pleine d'arbres qui perdaient leurs feuilles (nous étions en plein automne). Après un bref arrêt au musée des Beaux-Arts pour admirer une exposition de vêtements étendus l'un après l'autre (une genre de corde à linge géante, mais assez intéressante à regarder), c'est en ressentant ma balade dans mes pieds que j'ai regagné mon chez moi, fourbu mais content!

À bientôt!!

samedi 1 novembre 2014

Quelques notes sur Telesur

Note: J'avais commencé à écrire cette entrée le 2 avril 2013.

En ouvrant la télévision aujourd'hui, je suis tombé sur Telesur, la chaîne régionale d'informations télévisées en continu mise en place par Chavez il y a quelques années en tant qu'alternative aux réseaux traditionnels d'information (notamment américains). Inutile de vous dire qu'elle est subventionnée en majorité par le Venezuela, bien que d'autres pays sud-américains financent aussi (au nom de "l'intégration régionale") les inepties qui y sont diffusées.

Bon, j'ai l'air d'avoir une opinion préconçue sur cette chaîne-là, mais, en réalité, j'étais plutôt curieux de voir ce qu'il en était.  Dans le cadre de mon travail d'auxiliaire de recherche pour le centre d'études interaméricaines, j'avais fait des recherches et j'avais écrit un petit paragraphe sur Telesur à titre d'institution sud-américaine indépendante d'intégration. Bien que j'étais conscient qu'il s'agissait d'une chaîne alternative, la couverture qu'Internet donne à Telesur est généralement positive, alors je m'attendais à un genre d'Al-Jazeera version latino.

Ce n'est pas tout à fait le cas, disons.

Je commence par écouter l'émission "Les vrais États-Unis" dans laquelle un commentateur rappelle, outré, qu'il y a déjà eu des camps de concentration aux États-Unis, tout comme Guantanamo l'est aujourd'hui. Il met en garde le téléspectateur contre une disposition d'un obscur guide militaire de l'armée américaine qui prévoit apparemment que l'armée puisse détenir dans des camps ses propres citoyens en temps de crise.

Ça commence fort.


Suivent ensuite les infos du jour. Tout d'abord, un long reportage sur le fait qu'il y a 13 ans aujourd'hui, Chavez sortait de prison suite à son coup d'État raté. Puis vient l'explication détaillée et soporifique d'un sondage montrant que Maduro gagnerait haut la main si des élections étaient tenues demain (note: comme vous le savez, il a effectivement gagné, et le pays vit un chaos économique, politique et social depuis lors). Quant aux nouvelles internationales, il n'est essentiellement question que des Malouines et d'une intervention d'un "expert" uruguayen qui avertit que le Royaume-Uni pourrait éventuellement se servir des îles pour attaquer l'Amérique du Sud et s'emparer de ses ressources.

Je veux bien croire que les médias n'abordent souvent l'actualité que sous un seul angle, il y a tout de même des limites.

Puis, on passe aux pubs. Voilà qui est intéressant, me dis-je, quelle entreprise peut bien avoir intérêt à financer ce qui m'apparait désormais comme de la propagande "révolutionnaire bolivarienne" qui ne sert que les intérêts du gouvernement vénézuélien? Réponse: aucune. Toutes les "publicités" émanent en fait clairement du gouvernement du Venezuela. L'une d'elle aborde les grandes réalisations et les vertus de "l'Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amériques", une organisation régionale "alternative et solidaire" mise en place par Chavez en 2005 et financée par les pétrodollars vénézuéliens. Puis, quelques images nous rappellent avec émotion que Chavez est certes mort, mais son héritage continue de vivre. Mais le plus surréaliste de tout, c'est ce dessin animé qui nous montre allégoriquement "l'ascension divine de Chavez au ciel". Dans ce court joyau d'animation, Chavez se rend au paradis pour y retrouver quelques-uns des grands disparus de la gauche sud-américaine. L'ex-président vénézuélien y retrouve donc, en plus de l'omniprésent Bolivar (le libérateur de l'Amérique du Sud), le Chilien Salvador Allende, Che Guevara, Evita Peron, etc. Ça vous parait trop intense pour être vrai? Jugez vous-même : https://www.youtube.com/watch?v=kLwE8ERGdQM 

Après ces grands moments d'émotion, de retour aux (dés)informations.

Conclusion: Telesur n'est ni CNN ni Al-Jazeera. C'est plutôt Fox News ou, plus près de nous, Sun News, c'est-à-dire une chaîne "d'information" en continu fortement biaisée, dont la crédibilité souffre atrocement d'un parti pris politique évident. Très décevant.

À bientôt!

mercredi 29 octobre 2014

Tour d'horizon politique et social: le Chili en 2013

Note: J'avais commencé à écrire cette entrée en mai 2013.

Le Chili est un pays de contrastes qui traîne une histoire mouvementée et semble aujourd'hui se trouver à la croisée des chemins. En fait, c'est fascinant de voir à quel point le pays est présentement en ébullition!

En 3 mois à Santiago, voilà le constat que je ferais si on me demandais de décrire le pays tel qu'il est aujourd'hui. Ça décrit aussi bien le Chilien typique. Je vais essayer de vous expliquer pourquoi dans ce message.

D'abord, les contrastes. Historiquement, la société chilienne a toujours été très divisée à tous les niveaux, et on le voit encore aujourd'hui. À cause de ses ressources naturelles, le Chili est un pays riche. C'est aussi un pays capitaliste (et comment!) en bonne santé économique, un chef de file à ce titre en Amérique du Sud et un pro du libre-échange. Pourtant, c'est aussi l'un des pays les plus inégalitaires des Amériques. Ce qui donne une société qui ressemble à celle des États-Unis: une minorité de très riches, beaucoup de pauvres et une classe moyenne coincée entre les deux, plus riche que les plus indigents mais cependant beaucoup plus pauvre  (et nettement plus endettée) que ceux qui ont les moyens de se payer une villa à Vitacura, le quartier le plus huppé de Santiago. D'autant plus que la richesse du pays fait augmenter le coût de la vie (avec des prix à la consommation équivalents à ceux du Canada) sans que les salaires ne montent pour autant. Prenez mon ami Tirso, par exemple, chez qui j'ai habité pendant deux semaines avant de me trouver un appart. Tirso est technicien photo/vidéo dans un institut d'enseignement technique affiliée à une bonne université de Santiago (n.b.: Tirso a depuis changé d'emploi!). Ce qu'il gagne lui permet d'avoir un train de vie modeste mais très correct, notamment de pouvoir bénéficier d'un petit appartement moderne dans un édifice avec gardien et piscine et de pouvoir se payer quelques extras de temps à autre, comme d'aller manger dans un bon restaurent ou aller voir un show de musique, parce qu'il n'a pas d'auto. Pourtant, pour pouvoir économiser un peu, Tirso fait comme bon nombre de Chiliens et travaille on the side: les samedis, il est photographe dans des mariages. Ça, c'est "nada del otro mundo" (rien d'extraordinaire) pour les Chiliens! Bref, la classe moyenne subit une très forte pression au Chili. D'autant plus que les prix élevés pour tout encouragent l'endettement: chaque magasin propose ainsi des cartes de crédit maison avec lesquelles on peut payer (et avoir des rabais) sur plusieurs versements pour des choses aussi banales que l'épicerie  quand on n'a pas l'argent. Le contraste avec les familles riches de Las Condes/Providencia/Vitacura est frappant. J'ai été invité par un Chilien que j'avais connu au Québec à une fête dans le bungalow de ses parents à Las Condes (j'y ai d'ailleurs eu pas mal de fun!). L'endroit n'avait rien à envier à n'importe quelle maison de banlieue de chez nous, une demeure bien meublée, une voiture, une cour... bref, on se serait cru à Ste-Thérèse! Dans le quartier des affaires de Las Condes, on se croirait plutôt à New York, avec les businessmen pressés en costume, les hautes tours, les centres d'achats, les voitures luxueuses... Dès qu'on traverse la ligne imaginaire formée par la Plaza Italia, en plein centre de Santiago, là on se croirait économiquement plus en Argentine ou en Uruguay, et plus on va à l'est, plus on a l'impression d'être en Bolivie. L'argent, à Santiago, coule dans le même sens que le Rio Mapocho, la rivière chétive et fétide qui traverse Santiago: des Andes à l'ouest vers les poblaciones pauvres de l'est. 

L'inégalité dont je vous parle se transpose naturellement au niveau politique. Depuis les années 1960, le clivage gauche-droite est très marqué au Chili. Les familles riches ont toujours dominé le pays. Leurs valeurs conservatrices (famille et religion, surtout) imprègnent encore très fortement le Chili (exemple parmi d'autre, le divorce n'est légal au Chili que depuis 2004!). Sous eux, les masses (paysans, ouvriers, classe moyenne) ont longtemps accepté cet état de fait. Les disparités économiques ont néanmoins mené à une opposition aux élites traditionnelles dans les années 60, cristallisées par l'élection du socialiste Salvador Allende.  La réaction des élites conservatrices a été virulente: coup d'État sanglant de l'armée installant au pouvoir le régime criminel de Pinochet (extrême-droite). Aujourd'hui, les conservateurs sont de retour après une phase plus à gauche suite à la fin de la dictature (note: avec le retour de Bachelet, le centre-gauche est revenu au pouvoir maintenant!). Néanmoins, la société continue d'être divisée: les manifestations étudiantes, qui essaient de faire craquer le vernis conservateur de la société, en sont un bon exemple. La revalorisation de la culture Mapuche en est un autre. Ce peuple autochtone du Sud du pays qui a toujours défié les Espagnols puis les Chiliens a historiquement été marginalisé, mais on assiste aujourd'hui, dans les milieux progressistes, à un intérêt renouvelé pour leur héritage. La proprio de notre appart, Loreta, et son copain sont caractéristiques de ce nouveau Chili ouvert, qui soutient les luttes étudiantes, fustige le conservatisme et les dogmes religieux... Mais à droite, la résistance est forte! Soit dit en passant, Pinochet (surnommé "el Tata", i.e. un mot gentil pour dire "grand-père" en argot chilien) a encore ses fans dans les cercles de droite...

Les Chiliens ressemblent aux Américains non seulement sur le fait que leur société est inégalitaire, mais aussi quant à leur individualisme (une caractéristique qui est aussi très Canadienne/Québécoise). Ça, c'est une bonne différence avec le reste des pays d'Amérique latine, où le côté "communauté tissée serrée" prime souvent. À preuve, le capitalisme exacerbé qui caractérise le pays, basé sur le concept "tu n'as à payer que ce que utilises, et tu n'as pas à payer pour les autres". En outre, ailleurs en Amérique du Sud, les gens vont d'emblée t'aborder. Les Chiliens ne sont pas comme ça: si tu ne leur parle pas, ils ne t'aborderont pas...

Voilà pour ce bref tour d'horizon socio-politique! À bientôt!

Retour en arrière!

Bonjour!

Voilà plus d'un an que ma session à Santiago a pris fin. À pareille date l'an dernier, Marie-Pascale et moi étions en plein milieu de notre voyage en Amérique du Sud (au Guyana, pour être précis). Naturellement, j'avais beaucoup plus à faire que de terminer un blog sur ma session d'études au Chili!

Pourtant, en revisitant ce blog au hasard ce soir, je me rends compte que j'avais commencé à écrire de nombreuses entrées qui n'ont malheureusement jamais été complétées, faute de temps. Il faut dire que les deux derniers mois de ma session au Chili ont été excessivement occupés! Outre les examens et travaux relatifs aux cours que je suivais, il y avait aussi (et surtout) mon $#$&?$?% d'essai à terminer, le voyage à préparer, des tâches à faire pour un emploi/stage bénévole que j'avais décidé de faire au Chili en même temps que ma session... À travers ça, il fallait aussi profiter de ma vie d'étudiant étranger!

Bref, j'ai un peu (beaucoup) négligé le blog. J'en profite maintenant donc pour publier ce qui reste, avec quelques petits commentaires additionnels...

Bonne lecture, s'il me reste encore des lecteurs!

lundi 22 avril 2013

La recherche d'apparts, suite et fin!

Salut tout le monde!

Déjà près de trois semaines sans rien écrire, désolé! Ça passe vite! Je suis très pris par mes travaux ces temps-ci, mais je vais prendre un peu de temps pour vous raconter un peu comment ça se passe!

Il est temps que je vous parle un peu de mon appart!

Je vous avais laissé avec ma recherche d'appart peu après que j'aie appris, à regret, que je ne pourrais pas emménager dans le super appart avec des colocs bien sympas que j'avais trouvé près du métro Bellas Artes. Motif: ils préféraient accommoder l'un de leurs amis, ce qui est bien compréhensible.

Par la suite j'ai visité quelques autres apparts, dont voici la description:

L'appart parfait: le soir même de ma visite à Bellas Artes, j'avais rendez-vous dans un appart à deux pas de mon campus universitaire. J'étais un peu soupçonneux parce que le prix du loyer était plutôt en deçà du prix du marché (120 000 pesos, soit 280$/mois... une aubaine!) et qu'il n'y avait pas de photo sur le site internet, mais j'ai décidé de lui donner une chance quand même. En plus, ils demandaient quelqu'un qui resterait là au moins 6 mois, ce qui n'était pas mon cas, mais bon on ne sait jamais... En arrivant là, non seulement l'endroit était grand, lumineux, bien situé, bien joli, peu bruyant et propre, mais en plus mes potentiels colocataires étaient super gentils! Pour couronner le tout, il y avait le bas prix du loyer! Où était l'arnaque? S'il y en avait une, en tout cas je n'ai rien vu. Tout content, je dis donc à mon potentiel futur coloc que je suis disposé à le prendre tout de suite. Il me répond "Ok, inscris ton nom et ton courriel sur la liste! Tu es la 7e personne intéressée." Inutile de dire que mon sourire est un peu tombé. Comme je ne restais que 4 mois et que, statistiquement parlant, il y avait probablement au moins une personne qui restait plus longtemps que moi dans les 6 autres candidats potentiels, mes chances d'obtenir la chambre avoisinaient désormais 0 (et effectivement ils m'ont contacté 2 jours plus tard pour me dire qu'ils avaient pris quelqu'un d'autre). Je suis donc sorti de là un peu découragé. Ç'aurait vraiment été excellent!!

Je suis donc retourné à mes recherches et le lendemain je visitais l'appartement lendemain-de-brosse. Situé dans Barrio Brasil à 2 pas de chez Tirso et des métros, l'endroit avait tout pour être intéressant. Sauf que... en tout cas. Je sonne. Pas de réponse. Plusieurs coups de sonnettes plus tard et 2 appels, un gars finit par me répondre, la voix pâteuse, qu'il s'en vient m'ouvrir (il est 10h). En pyjama, les cheveux ébouriffés, le gars m'informe qu'ils ont eu un party la veille chez eux. You don't say?!?! C'est une information que j'aurais aisément pu deviner tout seul. Effectivement, l'appart, déjà sale et dégageant une odeur rance, est dans un état de lendemain de veille qui aggrave sa condition et ajoute à l'air ambiant un agréable fumet de fond de tonne. Le gars me fait visiter sommairement puis me montre ma chambre. L'endroit est exigü et surtout, obscur. Et pour cause: l'unique fenêtre (sale) donne sur un puits de lumière intérieur passablement sale (ai-je dit que c'était sale?). À 350$/mois, décidément, ce n'est pas l'endroit pour moi. Je remercie le gars, le laisse aller se coucher puis je me rends compte que mes options s'amenuisent...

En après-midi, je vais visiter l'appart-auberge de jeunesse. C'est pas cher mais impersonnel, on vit genre 18 dans une maison située passablement loin des métros dans Barrio Brasil. Je ne suis pas enchanté d'avance: je cherche plus à partager un appart avec des gens qu'à vivre dans un hôtel. Sur place, la question se règle rapidement cependant: ma chambre vient d'être louée. Pas de chance (dans un sens)!

Le lendemain, j'ai 2 autres visites, l'une dans Barrio Brasil et l'autre dans Lastarria, en plein centre de la ville. La première est finalement devenu mon appart! Comme il est à 2 pas de chez Tirso, je m'y rends rapidement. Malgré les échanges de courriels très sympathiques que j'ai eu avec la fille qui loue l'appart en question, je suis un peu désabusé et j'ai un peu l'impression de faire des démarches qui ne rapporteront rien. J'arrive sur place finalement: l'appart est dans un vieux bâtiment vert hôpital et les murs du premier étage (accessibles du trottoir) sont couverts de graffitis. La cage d'escalier est plongée dans le noir. À première vue, je ne suis pas trop sûr de l'endroit, bien que je sache que les cages d'escalier sont bien rarement éclairées pour économiser sur les frais d'électricité et que la plupart des bâtiments de Barrio Brasil sont couverts de graffitis. Cependant, quand je vois l'appartement: wow! C'est grand, relativement propre, bien divisé, la chambre est belle... En plus, ce n'est pas trop cher (340$/mois tout compris), à 5 minutes de deux stations de métro sur 2 lignes différentes, bien situé dans un quartier sympa et sécuritaire... Avec, en prime, un balcon entouré d'arbres avec vue sur la cathédrale en face. L'intérieur compense pour l'extérieur! Finalement, c'est sérieusement une option! La fille qui me fait visiter sous-loue 2 des chambres de l'appart parce qu'elle s'en va étudier en Espagne. Elle est super sympa mais je n'ai malheureusement pas la chance de rencontrer mes autres colocs potentiels. Sauf que j'ai aussi une visite le soir même dans Bellas Artes... Pour un prix similaire, je pourrais être à distance de marche de l'université! Je dis donc à la fille qui me fait visiter que je vais attendre de voir l'autre appart avant de prendre une décision définitive. Le soir même, finalement, j'attends pendant 45 minutes à la station de métro le gars censé me faire visiter son appart... Il ne viendra jamais finalement!

Ma décision est donc prise: je confirme à la fille que je prends la chambre! Elle est super heureuse que ce soit moi qui prenne la chambre mais je dois par contre attendre une semaine encore que la chambre se libère. Dans l'intervalle, je reste chez Tirso, qui aura eu la gentillesse de m'héberger pour presque 2 semaines!

Au moment d'emménager, je rencontre d'abord l'un de mes colocs: il s'appelle Bernardo et c'est un jeune ingénieur informatique péruvien super sympa avec qui je m'entends tout de suite très bien! Il parle un espagnol parfaitement neutre (apparemment que les Péruviens sont l'un des peuples hispanophones qui ont le moins d'accent), m'appelle amicalement "Don François" ("Don" et "Doña" pour les filles est un titre espagnol sans équivalent en français du même acabit que "monsieur" ou "madame" mais en beaucoup plus informel, il dénote surtout la proximité et ne s'utilise qu'avec le prénom) et dit "Que gracioso!"("comme c'est drôle!") à chaque phrase. Il me faudra par contre attendre une semaine de plus pour faire la connaissance de Cindy, une étudiante allemande en échange à la même université que moi mais en maîtrise en kinésiologie. Elle est super gentille et on s'entend très bien. Son espagnol est parfois laborieux, mais elle fait de gros efforts pour s'améliorer! On s'est rendus compte qu'on a beaucoup d'amis étrangers en commun, et on s'est même retrouvés au même party de pendaison de crémaillère d'une amie sans le savoir! Mes 2 colocs passent leur temps à inviter des amis à la maison, ce qui est super parce que ça me fait connaître plein de gens! Bernardo invite régulièrement une amie péruvienne avec qui il cuisine des plats de son pays (en fait, c'est plutôt elle qui fait pas mal tout alors que Bernardo coupe des limes par exemple: Bernardo ne cuisine pratiquement jamais, il mange soit au restaurent, soit il commande à manger!). Pour ceux qui connaissent, la cuisine péruvienne est succulente, et j'ai donc eu l'occasion de manger avec eux un très bon ceviche (du poisson pratiquement cru servi sur riz et accompagné d'une délicieuse sauce à la lime et aux oignons) et une excellente tarte au citron. Il y a aussi une autre Péruvienne super sympa qui vient faire son lavage à chaque semaine depuis que l'un de ses amis a détruit sa machine à laver en vomissant dedans lors d'un party bien arrosé (une bien charmante histoire)! Elle est retournée au Pérou maintenant mais si jamais ça adonne que je passe par là, j'aurais sûrement un endroit où rester! Bernardo a aussi un ami français avec qui il planche sur un projet de start-up informatique. Ils participent à un concours organisé par le gouvernement chilien qui leur permettrait éventuellement d'avoir les fonds nécessaires pour créer leur compagnie. Il est aussi bien gentil et ça fait toujours plaisir de pouvoir parler à quelqu'un dans sa propre langue! Quant à Cindy, elle a invité plusieurs de ses amis allemands à passer quelques jour à l'appart dans le cadre de leur voyage en Amérique du Sud. Il y a d'abord eu Eva, une fille super sympa qui fait le tour de l'Amérique du Sud en 7 mois. Elle a un humour cinglant que j'ai tout suite adopté! La première journée où elle est arrivée, Cindy n'était pas là et, plutôt que de manger seuls de notre côté, on a été mangé une chorillana dans un resto du coin. La chorillana est au Chili ce que la poutine est au Québec. C'est un plat de frites auquel on ajoute de la viande de boeuf effilochée, des saucisses et des oignons, le tout couronné d'un oeuf frit. Il manque la sauce et l'oeuf frit n'est pas vraiment nécessaire, mais c'est bon! Habituellement, les portions sont immenses et ça se mange au moins à 2. Dans ma gaucherie habituelle, j'ai trouvé le moyen de gesticuler précisément au moment où le serveur passait avec notre immense plat, et ma main a percuté l'assiette avec une force telle que l'oeuf frit a été éjecté vers le sol! Inutile de vous dire que la scène était à la fois très drôle et honteuse! Bref, je me suis très bien entendu avec Eva à partir de ce moment-là! Cindy a aussi invité un couple d'amis allemands en vacances au Chili, plutôt réservés mais bien gentils, et ne parlant que peu anglais et encore moins l'espagnol. Vous aurez donc compris que la vie en colocation se passe très bien!

Ma chambre est plutôt spacieuse, avec une grande fenêtre. J'ai un vue sur la cathédrale en face, qui est condamnée depuis le gros tremblement de terre de 1985 mais qui tient toujours en partie debout et qui demeure très belle. Par contre, c'est un peu bruyant le matin à cause de la rue, sans que ce soit intolérable. Je partage ma salle de bain avec Bernardo (nos deux chambres communiquent à la même salle de bain) alors que Cindy a sa propre salle de bain attenante à sa toute petite chambre. On a un salon/salle à manger commun, une petite cuisine, un balcon et un genre de solarium où on fait sécher notre linge. L'eau chaude et la cuisinière fonctionnent au gaz, comme c'est commun ici. Ça m'a quand même surpris: quand je suis arrivé, Bernardo m'a montré une petite boite en métal du genre boite électrique et m'a dit que je devais craquer un allumette et allumer le brûleur au gaz à chaque fois que je voulais de l'eau chaude! Je me suis alors souvenu d'un commentaire de Tirso qui m'avait spécifié quand j'étais chez lui que je n'avais pas besoin de faire quoi que ce soit pour que l'eau soit chaude, que ça se faisait automatiquement. J'avais écarté le commentaire en me disant que c'est un peu normal que l'eau soit automatiquement chaude quand tu ouvres le robinet d'eau chaude... Eh bien apparemment pas au Chili! Heureusement que ce n'est pas très long avant que l'eau devienne chaude (20 secondes)! Autre bizarrerie: comme c'est un vieil appart, il n'y a pas de chauffage central. Quand il va faire froid en hiver (juin-juillet-août), genre 0 la nuit, la seule chose qu'on a pour se chauffer est une chaufferette au gaz! Ça promet, mais c'est très commun pour les Chiliens de fonctionner comme ça! Enfin, côté propreté, ça va, mais Bernardo (qui habite ici depuis 5 ans) n'est pas nécessairement un maniaque du ménage disons!

Pour ceux qui seraient intéressés, vous pouvez aller voir mon appart sur Google Maps: l'adresse est Almirante Barroso 206, Santiago de Chile! Mon appart est au 2e étage (appartement 23).

Ah, une dernière chose: je partage aussi périodiquement l'appartement avec des araignées venimeuses. Pour vrai là. Avant de partir au Chili, une amie dont le chum est Chilien m'avait vaguement mis en garde quant aux araignées potentiellement mortelles qui peuplent le Chili. Je ne m'étais pas inquiété outre mesure: d'abord, son chum vivait dans le désert du nord du Chili, et je m'étais dit qu'à Santiago c'était différent. Ensuite, les araignées dangereuses vivent souvent dans des zones plus reculées et moins urbaines. Enfin, les bibittes font de toute manière partie des voyages hors des zones tempérées: j'ai eu ainsi affaire avec des araignées géantes au Vietnam et à Hong Kong et à une tarentule en Ouzbékistan, et j'ai survécu (ouf!). Et au Chili, on ne parle pas de grosses araignées, mais de petites. Bref, je ne m'en faisais pas trop. Sauf que... Je suis tombé par hasard il y a 3 semaines sur un article de journal qui faisait état des précautions à prendre avec la "araña de rincon", appelée plus communément la recluse brune du Chili. Cette charmante bestiole indigène au Chili possède un venin connu pour entraîner de fortes douleurs accompagnées de fièvres, nausées et maux de tête, nécrosant les tissus atteints et dont la morsure peut entraîner la mort dans 3% des cas. Bah, tant qu'elle vit loin de nous... Euh... En fait, elle vit cachée dans des anfractuosités et est particulièrement à l'aise dans les maisons et appartements du pays, du désert au nord à la Terre de feu au sud! Pour comble, Santiago n'est pas exclue: 60% des habitations abriteraient des recluses brunes du Chili. Grosse comme un 5 sous, elle est super craintive, pas du tout agressive et s'enfuit (vite) dès qu'il y a de la lumière et du bruit. Les rencontres avec l'humain devraient donc être limitées. Par contre, la nuit, comme elle ne tisse pas de toile, elle sort chasser. C'est là que ça peut devenir désagréable: elle peut se cacher dans les vêtements, les garde-robes et les couvertures, et mordre si elle se sent attaquée, i.e. si on la compresse en mettant ses vêtements par exemple. C'est pourquoi il faut toujours tout secouer, vêtements et couvertures, avant de les mettre sur nous... au cas où! Et il faut aussi séparer le lit du mur pour éviter que des recluses qui se promèneraient sur le mur ne finissent pas inadvertance par vagabonder sur soi pendant qu'on dort. La recluse brune possède aussi un prédateur naturel, une autre araignée (l'araignée-tigre), semblable mais inoffensive et un peu plus grosse. Comme l'une ne vient pas sans l'autre, voir l'une des deux n'augure rien de bon! Questionné à ce sujet, Bernardo m'assure qu'ils n'ont jamais eu de problème avec les araignées. Je commence quand même à prendre des précautions d'usage en secouant mes vêtements, tout en me disant que je m'en fais sûrement pour rien. Malchance ou coup du sort? Le lendemain, en secouant un chandail que j'avais laissé traîner par terre, devinez qu'est-ce qui tombe? Une araignée correspondant en tous points à la recluse!!! Pourtant, plutôt que de s'enfuir, elle a fait la morte sur place. Cette attitude bizarre m'a fait hésiter: serait-ce plutôt la bonne araignée, celle qui mange la venimeuse? Au bout d'un moment, je me suis dit que j'allais plutôt appliquer la sagesse moyenâgeuse "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens" pour ne prendre aucune chance! Le lendemain, en faisant le ménage, j'ai aussi découvert un squelette de mue d'araignée plus grosse, correspondant grosso modo à l'araignée-tigre et confirmant que l'araignée que j'avais envoyé ad patres la veille était bien venimeuse... Ouf! Depuis, je n'en ai revu aucune des deux mais je secoue religieusement tout mon linge et mes couvertures! Heureusement, ces bibittes-là sont surtout actives en été, et plus il fait froid plus elles sont discrètes... une chance que l'hiver approche! Morale de l'histoire: ne pas négliger les conseils donnés par des amis qui ont une connaissance intime du pays!

Je vous laisse sur une note plus légère: l'anecdote du jour, qui porte sur les mimes. À Montréal, aux feux rouges, il y a des squeegees qui viennent vous achaler pour nettoyer vos vitres. À Santiago, il y a plutôt... des jongleurs et des mimes! Sérieusement! L'autre jour, à un coin de rue de chez moi, je vois un gars habillé en noir, avec un béret et du maquillage blanc sur la figure. Dès que le feu est rouge, il s'en va faire des pitreries de mime devant les voitures et sous l'oeil amusé des passants. Le pire, c'est que ça marche! Parce qu'un mime, en général, c'est plutôt drôle!

À bientôt!!! Je vais essayer de réécrire plus souvent!

vendredi 29 mars 2013

Les cours!

Salut!

Je me rends compte que ça fait un bon moment que je n'ai pas publié de message! Il y a une bonne raison à tout ça: mes cours! Je vous fait un petit récapitulatif des cours que je suis et de comment c'est, suivre des cours de maîtrise à la Catolica!

D'abord, première chose: je suis 4 cours, répartis du lundi au mercredi, et ayant lieu entre 18h30 et 22h. J'ai donc 2 cours le lundi (18h30 à 21h30), un autre le mardi (20h à 22h) et un dernier le mercredi (20h à 21h30). Vous aurez remarqué que les cours durent en moyenne 1h30-2h, ce qui est nettement moins long que chez nous! Les cours ont lieu le soir pour maximiser la présence des étudiants, étant donné qu'un nombre appréciable de gens travaillent également le jour.

Au vu et au su de ce que je viens d'énoncer, le lecteur avisé va rapidement se rendre compte que 1) je n'ai que 6h30 de cours chaque semaine, ce qui est bien loin du 12h standard du Québec, et 2) qu'une bonne part d'étudiants travaillent à temps plein en plus de faire leurs cours. La conclusion logique à laquelle on en vient est que je vais avoir une session très relaxe. Avant d'arriver ici, je pensais la même chose, et l'expérience à l'étranger de certains de mes amis de maîtrise dans une université d'Argentine semblait vouloir le confirmer. Or, il n'en n'est rien. La Catolica du Chili est la meilleure université hispanophone d'Amérique latine et elle tient à sa réputation! Ainsi, d'abord, dans chacun de mes cours, j'ai à faire une tonne de lectures qui, pour moitié d'entre eux, seront directement matière à examen. C'est malheureux mais compte tenu des travaux à faire, on comprend vite qu'à moins de ne faire que ça à temps plein, il est impossible de faire toutes ces lectures. Je me demande un jour si, en sciences humaines, les professeurs vont réaliser que ça ne sert à rien d'inonder un étudiant de lectures parce qu'aussi intéressantes soient-elles, personne ne va les lire s'il faut consacrer 2 jours entiers pour en faire le tour! Il suffirait de s'en tenir à 2-3 textes, quitte à les analyser à fond... Enfin. Ensuite, c'est surtout au niveau des évaluations que le bât blesse particulièrement. D'ici la fin de la session, j'ai:

- 3 travaux de 15 pages à faire (dont 2 en espagnol et heureusement 2 en équipe);
- 3 présentations orales (toutes en espagnol, dont une de 15 minutes);
- 6 examens take-home d'environ 10 pages chacun (dont 2 en espagnol);
- 4 examens partiels ou finaux (dont un examen oral, en espagnol naturellement);
- 2 analyses de cas à faire en équipe en classe nécessitant la production d'un résumé de 5 pages chacun.

Ajoutons à ça le fait que je travaille à temps partiel à distance comme assistant de recherche pour mon directeur d'essai à l'Université Laval et que je dois également terminer mon essai... Ah et que je travaille aussi pour le Congrès national chilien (l'équivalent de leur Assemblée nationale), ce dont je vous reparlerai plus tard! Disons que je m'attendais à être plus tranquille ici du point de vue des cours! Remarquez, j'ai choisi de venir au Chili justement parce que l'expérience de mes amis en Argentine les avait déçu d'un point de vue académique... Ils avaient beau avoir du temps libre, ils étaient mal encadrés, n'avaient qu'un travail à faire par cours qu'ils pouvaient remettre un an après la fin des cours (!) et le prof pouvait leur remettre les corrections 1 an après la remise de leurs travaux, retardant d'autant leur diplomation (!!!) : bref, le niveau était nettement inférieur à celui de mon programme à l'Université Laval (et un peu ennuyant). Je voulais avoir mieux : disons que j'ai été servi!

Cela dit, mes cours sont généralement super intéressants! Les lundi j'ai d'abord un cours d'Analyse de politique extérieure. Dans ce cours fascinant donné par un historien/politologue chilien, on passe en revue les différentes politiques étrangères des États d'Amérique du Sud (avec un focus sur l'Argentine et le Chili) de même que de certaines grandes puissances (Chine, États-Unis, Union européenne, Inde...). Bien plaisant! Ensuite, j'ai Processus économiques internationaux, avec un prof espagnole, qui passe en revue les différentes instances  économiques gouvernant les relations internationales (par exemple l'OMC) et régionales (par exemple l'Union européenne, l'ASEAN, etc...). C'est un cours mélangeant droit, politique et économie et c'est très intéressant! Le mardi, j'ai un cours de théorie politique contemporaine, qui est en fait un cours sur les différentes idéologies politiques du monde. Le cours est donné par un prof... québécois! Il est très gentil et permet à ses étudiants de faire leurs travaux en espagnol, anglais et français... Disons que je vais en profiter! J'ai été plutôt surpris de voir que dans ce cours, dans le cadre des idéologies conservatrices, nous allons étudier la philosophie politique qui sous-tendait le régime de Pinochet. Ça promet d'être bien intéressant! Enfin, le mercredi, j'ai un cours de Prise de décision politique, un cours avec un sujet très intéressant: il s'agit de comprendre ce qui motive un acteur politique à prendre une décision particulière, compte tenu du contexte et des alternatives possibles. Malheureusement, le professeur qui enseigne ça est en fait un doctorant français qui n'est pas un très bon vulgarisateur et qui, manifestement, est décidément destiné à la recherche plutôt qu'à l'enseignement. Son incapacité à donner fréquemment des exemples concrets à la théorie rend le tout un peu lourd disons... Enfin, il est bien gentil tout de même. J'ai donc 2 cours donnés par des francophones... ce qui est tout de même cocasse!

En ce qui concerne la langue, pas de problème à comprendre tout ce que le prof dit! D'autant plus que, sur 4 profs, 2 n'ont pas l'espagnol comme langue maternelle (ce qui facilite ma compréhension) et une autre vient d'Espagne (et par conséquent son espagnol est facile à comprendre). Le prof chilien est définitivement celui qui me demande le plus d'attention, d'autant plus qu'il ne parle pas fort! Je vous reparlerai de l'espagnol du Chili, qui est particulier!

Voilà pour mes cours donc! Là présentement c'est le congé de Pâques mais j'ai un gros take-home à faire pour lundi, donc pas question de partir quelques jours visiter une autre ville....

Un mot sur les étudiants de maîtrise: ils sont super fins! La grande majorité d'entre eux sont Chiliens, mais il y a également des étudiants du Honduras, du Mexique, de Bolivie, de Belgique et du Brésil qui font toute leur maîtrise ici. Quant aux étudiants en échange, à la maîtrise en science po, à part moi, il n'y a qu'une autre personne, une Suédoise. Rapidement, je me suis lié d'amitié avec le petit groupe qui gravite autour d'Alexandra, la belge wallonne (et donc francophone) qui étudie ici et avec qui ça a tout de suite cliqué. Au sein de cette petite bande il y a la Mexicaine, super gentille, qui m'a adopté tout de suite et me gratifie d'un "Hola lindo!" à chaque fois que je la vois (au Québec, dire "salut mon beau" à un ami serait interprété bizarrement, mais dans le monde hispanophone c'est simplement une familiarité usuelle entre amis... tout le monde se dit ça!). Il y a aussi quelques Chiliens "de muy buena onda" (bien sympas), bref c'est plutôt agréable! Par ailleurs, je me suis aussi lié d'amitié avec le Bolivien (qui m'a d'ailleurs invité chez lui à Sucre "quand je voudrai"!) et avec Jaime, un Chilien bien sympathique qui m'a invité à manger chez lui hier (c'était une expérience en soi: il y avait lui, sa mère (plutôt âgée: elle aurait pu être sa grand-mère) et sa "nana", ou bonne/cuisinière (très commun au Chili d'avoir un domestique, au moins à temps partiel). Naturellement c'était excellent, on a mangé énormément de spécialités chiliennes, le tout à 15h comme il se doit ici.  C'était bien sympa, donc!) Enfin, je suis aussi devenu ami avec Cecilia, la Suédoise, avec qui on partage nos expériences d'étudiants étrangers!

Pour finir, l'anecdote du jour: la salle Jaime Guzman. Deux de mes cours ont lieu dans cette salle de classe de la Casa central. Qui était Jaime Guzman? Avant d'entrer dans le premier cours de Théorie politique contemporaine, je n'en savais strictement rien et, très franchement, il m'importait peu que je découvre qu'il s'agisse d'un obscur professeur émérite/doyen/donateur de l'Université Catolica. Alors que nous passons en revue le plan de cours, le professeur québécois qui enseigne le cours s'arrête sur la partie consacrée à l'idéologie conservatrice dans les régimes autoritaires. Puisque nous sommes au Chili, l'exemple de la dictature de Pinochet se prête particulièrement bien à l'exercice. Le prof nous annonce donc que nous allons lire des textes sur le mouvement gremialista , idéologie politique qui sous-tendait le régime militaire d'extrême-droite de Pinochet. Or, l'auteur phare de ce mouvement n'est nul autre que... Jaime Guzman, conseiller politique de Pinochet,  qui va activement soutenir le régime en nommant des sympathisants à tous les postes de l'administration publique et relativisera les grandes entorses aux droits humains (et notamment les exécutions et la torture d'opposants politiques) comme étant le "coût objectif" de toute révolution... Après la fin de la dictature, il enseignera à la Catolica mais sa position d'idéologue de la junte lui vaudra d'être assassiné après l'un de ses cours. Comme le prof nous fait remarquer, avec un brin de moquerie et d'ironie, la Catolica a choisi son camp: la salle dans laquelle nous nous trouvons porte le nom d'un des grands collaborateurs de Pinochet, et non, par exemple, celui de Salvador Allende, le président de gauche démocratiquement élu et renversé en 1973 par le régime militaire. Pour vous donner une idée, c'est un peu comme si une salle de cours en Allemagne s'appelait la salle Hermann Goering ou Heinrich Himmler! Bref, disons que c'est spécial. Ça a beau être un prof de la Catolica, disons que c'est un personnage controversé, pour être politiquement correct. Ça en dit long sur le conservatisme de mon université, traditionnellement de droite et reposant sur la moralité chrétienne! Au Chili par contre, la société reste très divisée sur la question de la dictature et Pinochet a encore des fans (et pas mal plus qu'on pense). Je vous en reparlerai!

À bientôt!!